• Formation par les pairs - auto formation

     La formation par les pairs  

     

    Aujourd'hui, la complexité du métier est telle que les professeurs ne peuvent plus rester isolés dans leurs classes. Les démarches pédagogiques évoluent fortement, du fait des outils numériques, des rénovations de programmes qui introduisent des pratiques et des exercices de type nouveaux, de la multiplication de dispositifs qui introduisent de la pluri-disciplinarité (comme au lycée les enseignements d’exploration, l’accompagnement personnalisé), ou des interrogations qui concernent le champs croisé compétences/connaissances. Travailler ensemble ne signifie pas échanger des documents intéressants ou élaborer des devoirs communs, comme il était coutume de le faire par le passé. Il s’agit plutôt de construire une culture de projets communs qui concerne la pratique pédagogique, et pas seulement les textes mis à disposition des élèves. En allant dans les classes de ses collègues on dispose d'un riche matériau partagé qui offre des possibilités d'analyses qu'on ne trouve nulle part ailleurs dans les formations. Cette formation commune s'effectue avec les pairs, davantage que par les pairs. Elle concerne à la fois les aspects didactiques liés à la discipline mais aussi pédagogiques. De nombreux axes d'observations sont possibles : comment mon collègue organise la classe? Travaille l’oral avec les élèves? Les met en activité? Gère les incivilités...

     

    La formation par/avec les pairs doit permettre de sortir du champ disciplinaire. En visitant des collègues qui enseignent des disciplines « sœurs » comme l'espagnol et l'anglais, les arts plastiques et l'éducation musicale, les sciences physiques et les mathématiques, le professeur peut observer et analyser  comment une même notion est abordée différemment pour comprendre quelles peuvent être les difficultés des élèves. La transposition dans sa matière est d’autant plus aisée et efficace.

     

    En croisant avec des disciplines très différentes, le champ d'observation est principalement axé sur la pédagogie et non sur la didactique, donc sur la mise en activité. C'est en s'ennuyant au fond de la classe que l’on comprend tout l'intérêt de varier les activités et de mettre les élèves réellement en réflexion, en action, en production.

     

    Cette formation est une sorte d'accompagnement mutuel car elle peut être régulière mais n'entre dans aucun dispositif. Elle est liée aux envies et aux affinités entre des personnes souhaitant entrer dans cette démarche d’échanges. Elle demande, pour réussir, d'être en confiance avec ses collègues, d'ouvrir la porte de sa classe, d'accepter la critique (argumentée) et de savoir analyser une pratique professionnelle, c'est-à-dire de mettre des mots derrière des actes, de pouvoir prendre du recul, conceptualiser, et proposer des voies différentes pour le cours observé. Elle se révèle d'une richesse professionnelle insoupçonnée.

     

    L’intérêt des visites de classes s’accroît quand elle s'effectue dans le cadre des liaisons : école/collège, collège/lycée et lycée/supérieur. L'objectif n'est pas de chercher à imposer une méthode à son collègue, mais de comprendre les différences méthodologiques qui imprègnent chaque cycle pour faciliter la transition et aider les élèves à s’imprégner plus rapidement des nouveaux attendus qui restent souvent implicites et qui sont mieux compris par les enfants dont les parents possèdent les codes du système éducatif.

     

      Analyser sa pratique  

     

    Il apparaît enfin un dernier champ de formation qui peut surprendre, puisqu'il s'agit de l'autoformation par l’examen de sa pratique pédagogique quotidienne. Celle ci est plus complexe qu'il n'y parait. On peut commencer par définir une grille de critères quantifiables et en adéquation avec le métier de professeur. Le plus simple et le plus pertinent étant bien entendu de partir du texte qui régit les compétences des enseignants[1]. Ainsi, aucun champ d’analyse ne sera oublié.

    Cette réflexion ne doit pas être l’occasion de s’auto flageller, ni de s’encenser, ni de fermer les yeux sur ses pratiques en reportant la faute sur les autres, élèves, collègues ou hiérarchie. Elle a pour objectif de poser sainement et le plus objectivement possible les aspects positifs qui ont été analysés, d’envisager les axes de progrès faciles à mettre en oeuvre mais aussi de bien repérer et comprendre ses éventuelles difficultés pour y remédier. Tout en restant pragmatique, il est toujours intéressant d’envisager d’autres voies possibles pour gérer la classe, pour proposer des séances plus riches, intéressantes et variées, ou pour construire des séquences plus innovantes.

     

    La formation professionnelle organisée lors des animations pédagogiques ou dans les stages du plan académique a un impact évident pour faciliter cette auto-analyse. Elle fournit les pistes d’évolution et permet de mettre en regard le vécu du quotidien avec les propositions formulées pendant les stages.

     

    La réflexion sur son travail ne peut se soustraire de la prise en compte des résultats des élèves (moyennes et écart-type) et de leur orientation. Des moyennes faibles doivent questionner l’élève, son travail, voire son attitude. Elle interroge aussi chaque professeur, sur les contenus d’enseignement, les formes d’évaluation, de préparation et de remédiation proposées. En ce qui concerne l’orientation, l’effet professeur est plus important qu’il n’y parait à première vue. Cependant il n’est pas facile à mesurer, sauf à considérer un nombre important de classes et d’élèves, donc à mettre en place une analyse statistique que peu d’établissements sont en mesure de réaliser à ce jour.

     

    En conclusion, l’autoformation consiste à recueillir dans un premier temps des données pertinentes sur sa façon de conduire la classe et de se comporter avec les autres membres de la communauté éducative. De définir ensuite des objectifs concrets pour progresser en différentiant ceux qui sont opérationnels, de court terme, qui peuvent être atteints en modifiant « par la méthode des petits pas » sa manière d’être et les objectifs de moyen et long terme. En procédant régulièrement à des ajustements successifs, dont les impacts ne sont pas visibles immédiatement, on peut changer radicalement et finalement assez rapidement le fond et la forme de l’enseignement proposé. Cela débute par l’observation des pratiques des collègues, d’échanger ouvertement avec eux, le chef d’établissement, l’inspecteur, de prendre en compte les demandes des élèves en considérant qu’elles ne sont pas toutes illégitimes.



     

    Formation par les pairs - auto formation

    [1] arrêté du 1/7/2013 ; bulletin officiel n°30 du 25 juillet 2013