• La personnalisation des apprentissages

       

                                                                                           Le traitement de la difficulté scolaire

     

    Face à la difficulté, qu’elle soit scolaire ou non, chacun répond à sa manière, avec son caractère et l’expérience acquise. Certains sont prêts à affronter les obstacles sans faiblir et avec adversité quand d’autres se laissent facilement submerger par des détails sans grande importance et désespèrent de parvenir au but. Il apparaît que les adolescents sont sujets à facilement s’isoler et se mettre intellectuellement à l’écart des cours dont ils ne conçoivent pas l’intérêt et l’enjeu. Beaucoup d’élèves sélectionnent leurs matières parce qu’à moment donné ils n’ont pas réussi à comprendre ce qui leur était demandé. Et pourtant, il suffit souvent de peu de chose pour remettre sur les rails des jeunes qui ne saisissent pas immédiatement ce qu’on attend d’eux.

     

    En étant trop focalisé sur le programme on peut oublier l’essentiel, transmettre le plaisir de faire, de comprendre et de réussir

     

    Si la difficulté ponctuelle se traite facilement dans la classe, immédiatement, il n’en va pas de même lorsque les problèmes deviennent importants et persistants.

     

    En France, le redoublement a été par le passé la solution proposée par l’institution scolaire pour remettre en course un élève en échec. De nombreuses études, toutes concordantes, ont montré que cette solution n’était plus acceptable socialement et économiquement car le ratio des redoublements réussis sur les redoublements effectués est très faible. Or, les élèves en difficulté existeront toujours Il est donc impératif de proposer autre chose pour ne pas avoir des adolescents qui changent de niveau scolaire sans progresser. La conséquence de ce phénomène étant l’accroissement des hétérogénéités dans les classes, aspect qui peut devenir difficilement gérable en fin de scolarité obligatoire.

     

    Les dispositifs comme l’accompagnement personnalisé ou l’accompagnement éducatif proposent des pistes de remédiation intéressantes mais il faut se garder de la tentation d’externaliser une aide qui devrait être fournie pendant la séance de cours. C’est en classe qu’on apprend, au milieu de ses condisciples. Les dispositifs ne servent pas à refaire du cours en petit groupe mais à débloquer des situations par des détours pédagogiques originaux qui ne sont pas adaptés quand la classe est au complet ou qui sont difficiles à mettre en œuvre devant un public trop nombreux. La classe est le lieu du repérage et du traitement de la difficulté moyenne. Les dispositifs d’accompagnement visent à compléter et renforcer le travail du professeur, pas à s’y substituer. C’est la raison pour laquelle on insiste tant sur la méthodologie lors de ces séances à effectifs réduits, une méthodologie qui s’appuie évidemment sur les disciplines.

     

    Quand l’élève se sent dépassé dans la plupart des matières il décroche, d’abord intellectuellement, puis physiquement en ne venant plus en cours. Au début il est absent quelques jours par mois, puis quelques jours par semaine. Passé seize ans il finit par quitter l’Ecole sans diplôme pour gonfler le rang des trop nombreux décrocheurs scolaires. Cet engrenage infernal a généralement de multiples causes : scolaires, sociales, familiales, environnementales. Ces élèves en échec, souvent pénibles, sont difficiles à gérer (comment ne le serait on pas quand on s’ennuie toute la journée assis à une chaise derrière un bureau). De fait, leur absence est souvent vécue comme un bienfait, tant par le professeur que par les autres élèves de la classe. D’autres s’enferment dans un mutisme total et décident un jour de ne plus revenir dans l’établissement. Dans les deux cas, les solutions ne sont jamais évidentes. Elles doivent en tout cas être construites au cas par cas, impliquer l’ensemble des professeurs de la classe, le CPE, le chef d’établissement, la famille et l’élève lui-même, quelquefois l’assistante sociale et l’infirmière, parfois même la justice dans certains cas graves. La réponse individualisée passe par le contrat et un suivi régulier. Les objectifs à atteindre, progressifs, doivent valoriser les efforts et redonner confiance. Il n’est plus question de programmes à connaître mais de petits pas pour se remettre en selle.

    Si les causes du décrochage sont multiples, c’est en premier lieu l’Ecole qui doit se mobiliser pour redonner une deuxième chance à ces jeunes et leur faire redécouvrir le goût du métier d’élève et l’espoir d’un avenir aux horizons dégagés.

     

                                                                                             Le handicap

     

    Tous les élèves à besoin particulier ne peuvent réussir que si l’institution, donc en premier lieu les enseignants, tient compte de cette différence qui les caractérise puisqu’une attention spécifique leur sera apportée. Il n’y a pas si longtemps, la dyslexie, la dysphasie… représentaient des termes médicaux qui restaient le plus souvent au seuil du collège et du lycée. Les élèves en situation de handicap n’étaient pas, pour la plupart, scolarisés en milieu ordinaire[1].

    En modifiant le regard qu’elle portait à ces enfants, la société dans son ensemble a permis qu’on trouve des solutions à leur scolarisation, au milieu des autres élèves. C’est une révolution qui prend aussi sa source dans le concept de personnalisation des parcours.

    Pendant très longtemps, les élèves malades ou en situation de handicap ont été pris en charge par des établissements spécialisés. Or, un adolescent en situation de handicap est en mesure de développer des compétences, et d’engranger des connaissances lui permettant de s’insérer correctement dans la société.

     

    Si au début les professeurs ont été quelque peu surpris et désarçonnés d’avoir ces élèves en classe, souvent accompagnés d’un autre adulte, ils ont fait face avec professionnalisme à cette nouveauté et ont su pour la plupart répondre aux demandes qui leur ont été faites par les familles.

     

    Le droit à l’éducation pour tous les enfants, quel que soit leur handicap, est un droit fondamental reconnu par la nation

     

    Les principaux troubles qui caractérisent le handicap sont :

    -          les troubles intellectuels et cognitifs (en particulier l’autisme),

    -          les troubles psychiques, par exemple de la personnalité et du comportement,

    -          les troubles du langage (dyslexie,…)

    -          les troubles auditifs ou visuels

    -          les troubles moteurs (hémiplégie, amputation,…)

    -          les troubles liés à des maladies graves (cancer, maladie chronique, cardio-vasculaire)

     

    Les adolescents dont on reconnaît le handicap font l’objet d’un projet personnalisé de scolarisation (PPS) entre la MDPH (maison départementale des personnes handicapées) et la famille. Celui-ci doit être cohérent avec le parcours de formation souhaité et possible. Un accompagnement est mis en place. Il prend la forme d’un recours à une personne adulte extérieure (Accompagnement de Vie Scolaire), d’un aménagement possible d’emploi du temps et/ou du matériel pédagogique. Enfin, il faut noter qu’un enseignant référent organise le suivi de ce PPS.

     

    Si le handicap peut être géré au niveau individuel, avec le soutien de l’équipe éducative, la scolarité s’effectue dans une classe habituelle. Il s’agira alors pour le professeur d’être attentif à la demande exprimée par l’élève. Ainsi, des gestes simples, au quotidien, facilitent l’instruction : le type de police de caractère adopté dans les photocopies (arial), la taille de la police de caractère, les paillasses de laboratoires adaptées, l’utilisation d’un micro cravatte relié à l’écouteur d’un élève déficient auditif, le cahier de textes numérique mis quotidiennement à jour avec les documents travaillés au cours de la séance…

     

    Dans les cas plus sévères, l’élève pourra intégrer, dans le collège ou le lycée, une Unité Locale d’Insertion Scolaire (ULIS) dont l’enseignement est pris en charge par un maître spécialisé qui possède le 2CA-SH (certificat complémentaire pour les enseignements adaptés et la scolarisation des élèves en situation de handicap, équivalent du CAPA-SH pour le premier degré).

     

    Actuellement plus de 220 000 enfants de 3 à 16 ans en situation de handicap sont scolarisés en milieu ordinaire, dont 70 000 en ULIS.

     

    Les conditions de passation des examens pour les élèves en situation de handicap sont régies par des circulaires spécifiques. Les salles peuvent être aménagées, les sujets adaptés (par exemple en braille), les durées augmentées d’un tiers de temps en général.

    Le défi aujourd’hui n’est plus dans la scolarisation au collège ou au lycée des élèves en situation de handicap, mais de favoriser leur poursuite d’étude dans l’enseignement supérieur.

     

                                                                                              Les élèves précoces

     

    Les élèves intellectuellement précoces ou manifestant des aptitudes particulières représentent environ 2% de l'effectif du collège ou du lycée. Les 2/3 d’entre eux sont bien intégrés et poursuivent une scolarité normale, mais paradoxalement ils sont aussi nombreux à être en difficulté scolaire alors qu'ils présentent des capacités intellectuelles remarquables, attestées par différents tests qu'on peut leur faire passer.

    Il n'y a pas de définition précise ni harmonisée entre les pays européens de ce terme d'élèves précoces. De plus, il est important de savoir qu'ils ne manifestent pas de dispositions intellectuelles identiques, certaines sont liées au langage, d'autres à la mémoire, d'autres à la faculté d'analyse ou de conceptualisation... Mais dans tous les cas, leur point commun est qu'ils possèdent une ou plusieurs capacités intellectuelles ou cognitives supérieures à celles des enfants du même âge, quand bien même leurs performances scolaires seraient dégradées.

    En effet, ne voyant pas l'intérêt de s'attarder sur des leçons ou sur les concepts expliqués par le professeur ils désinvestissent leur scolarité et finissent par avoir de mauvais résultats. Cela conduit ces élèves quelquefois à la révolte ou au contraire au repli sur soi.

    Il est donc important de pouvoir repérer les élèves qui montrent au quotidien une intelligence vive et qui ne réussissent pas pour entreprendre des tests et dépister un cas éventuel d'élève précoce. Le seul regard du professeur n'est en effet pas suffisant pour conclure dans ce domaine. Il s’accompagne d’une demande de prise en charge par le psychologue scolaire qui va proposer une batterie de tests et conduire une analyse fine et précise des potentialités constatées.

     

    Il s'agit donc pour les professeurs de savoir que cette réalité d'élèves « doués » mais en échec, voire en souffrance psychologique, existe et peut être traitée par une prise en charge particulière. Lorsque l'élève a été repéré, une adaptation du parcours scolaire peut être envisagée. En accord avec la famille et le chef d'établissement, on peut concevoir une poursuite d’étude en partie à un niveau qui est normalement le sien et l’intégrer dans une classe d'un niveau supérieur dans certains champs disciplinaires. On peut aussi proposer à l'élève d'être suivi par un enseignant qui lui offrira l'occasion de s'investir sur des tâches plus complexes qui feront travailler son intelligence et qui le motiveront. Les possibilités sont nombreuses. Cela demande d'avoir une réflexion sur le lien entre la classe ordinaire et la classe ou le groupe d'accueil provisoire. Dans un collège de 600 élèves on peut évaluer à une douzaine le nombre d'élèves intellectuellement précoces. Toute la difficulté est de repérer ces 3 à 4 élèves en échec mais dont les talents ne demandent qu'à être valorisés dans le cadre d'un parcours individualisé pensé en concertation entre les parents, la direction et l'équipe éducative de l'établissement.

     

                                                                                           Les élèves allophones

     

    Parmi les élèves à besoin particulier, il faut souligner le cas des élèves allophones. Dans les académies frontalières, d'Ile de France ou même dans le Périgord qui accueille de nombreux anglais et hollandais, cette problématique ne peut pas être considérée comme secondaire. Une académie comme Créteil accueille dans le secondaire environ 2700 élèves allophones nouvellement arrivés en France tous les ans.

    Par définition, un élève allophone parle à son arrivée sur le territoire national une autre langue que le français. Le Bulletin Officiel de l'Education Nationale (BOEN) indique qu' « assurer les meilleures conditions de l'intégration des élèves allophones arrivant en France est un devoir de la République et de son Ecole ».

    Après être passé dans un établissement spécialisé qui leur donne des rudiments de langue, les élèves intègrent en cours d'année une classe ordinaire. Leur emploi du temps est adapté pour permettre une intégration progressive. Ils commencent généralement par trois disciplines pour lesquelles le français n'est pas considéré comme limitant dans les apprentissages : l'EPS, l'éducation musicale et les arts plastiques. C'est par la proximité avec les autres élèves que l'apprentissage de la langue sera favorisé. Dans un second temps, progressivement, ces élèves vont intégrer les cours des autres disciplines. Là encore, un suivi personnalisé sur une période plus ou moins longue va se poursuivre. Il portera sur la méthodologie, la pratique de la langue dans toutes les disciplines, l'orientation. La mise en oeuvre d'une pédagogie différenciée accélèrera l’intégration de l’élève et la poursuite d’études. L’établissement d’accueil doit aussi tenir compte des conditions de vie de l'adolescent et par conséquent des rencontres régulières avec les parents seront privilégiées. L'innovation pédagogique, notamment grâce aux usages du numérique, est un levier d'apprentissage qui peut se révéler assez vite performant dans ce cas.

     

    La personnalisation des apprentissages



    [1] Les évolutions ont été très importantes ces dix dernières années. La loi handicap du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées institue le droit à une scolarisation en milieu ordinaire au plus près du domicile, l’adaptation du parcours scolaire, l’association des parents aux décisions d’orientation. Cette loi a été suivie de plusieurs décrets  : l’organisation de la formation en école primaire et au collège (24 août 2005), la présence d’un référent adulte accompagnateur (30 décembre 2005, puis 20 août 2009), l’aménagement des examens et concours (21 décembre 2005).


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