•  

    La question semble secondaire mais elle alimente de nombreuses discussions, non seulement entre les professeurs mais aussi entre et avec les parents. Que le type du support d’écriture soit laissé à l’initiative de l’élève ou imposé, il n’est pas superflu d’analyser les avantages et inconvénients de chacun d'eux. Il est aussi important d’expliquer aux élèves et parents les souhaits ou les volontés qui ont été affirmés car les raisons qui dictent les choix sont diverses. Il est par conséquent utile de mettre de la cohérence dans le discours adressé aux parents. En effet, les disciplines ayant leurs propres spécificités, les préférences des enseignants pour une forme ou une autre sont souvent légitimes mais pas toujours clairement énoncées.

    Pour résumer, trois attitudes existent concernant ce type de fournitures scolaires. La première consiste à laisser une totale liberté aux élèves en considérant qu'ils sont les mieux à même de savoir ce qui est bon pour eux. Cette pratique a l'avantage de rendre autonomes et responsables les élèves mais n'est pas toujours adaptée pour les plus jeunes, en particulier en sixième et cinquième. Les professeurs qui laissent le choix indiquent toutefois souvent  leur  préférence pour aider les indécis. A l'autre extrême, certains professeurs sont très précis dans leur demande et n'acceptent pas qu'on y déroge. Certains peuvent avoir des exigences difficiles à justifier, par exemple un trop grand nombre de cahiers, ou un cahier de deux cent pages qui sera très volumineux et difficile à transporter. Ces cas sont heureusement assez rares. La plupart du temps les professeurs donnent des indications relativement précises et font des choix raisonnables.

     

    Avant de demander d'acheter tel type de cahier ou de classeur, on peut se poser la question du coût pour les parents et du poids pour l'enfant qui le porte. Un cahier grand format 24x32, 96 pages pèse environ 350 g, et 500 g pour 140 pages. Quatre cahiers de ce dernier type alourdiront ainsi le cartable de 2 kg. Les mêmes cahiers en format 21x29,7 diminuent le poids d'environ 20%.

    Suivant les disciplines, les professeurs préfèrent les petits ou les grands carreaux. Il faut savoir que les jeunes élèves ont plus de difficultés à écrire correctement quand les interlignes ne sont pas marquées.

     

    Voyons d'abord les avantages et les inconvénients du cahier par rapport au classeur. Le cahier permet d'avoir l'ensemble des leçons à disposition pendant les heures de cours, ce qui offre la possibilité de travailler les nouvelles séquences en consolidant régulièrement les acquis antérieurs. Un cahier est a priori ordonné, mais l’expérience montre qu’un contrôle régulier n’est pas superflu, que l'élève soit au collège ou au lycée. En revanche, la tenue d'un cahier peut poser des difficultés si il est organisé en plus de deux parties. Pour rédiger les exercices, il arrive souvent que les élèves doivent retourner leur cahier. Cela ne représente pas un obstacle supplémentaire dans la gestion de leurs écrits. Mais si le professeur décide aussi de traiter séparément plusieurs champs disciplinaires dans le même cahier, par exemple l’histoire et la géographie, les approches linguistiques et culturelles en langue vivante, le projet théâtre et l’analyse de textes littéraires en lettres… en commençant l’un d’eux au début et l’autre au milieu du cahier on peut rapidement aboutir à une désorganisation dommageable. La solution d’utiliser plusieurs cahiers résout ce problème mais peut créer des contraintes à certains élèves qui ne sauront jamais lequel doit être apporté en classe. Or, prendre les deux n’a pas d’intérêt et augmente le poids du cartable. Notons enfin qu’un grand nombre de photocopies à coller, pratique qui semble en expansion, peut compliquer la lecture et la compréhension des notions importantes et nouvelles à acquérir mais aussi alourdir considérablement et déformer les cahiers.

     

    Le classeur (ou le trieur) présente plusieurs avantages appréciables. Partagé à plusieurs disciplines il est globalement plus léger que l'ensemble des cahiers auxquels il se substitue. Les possibilités de rangements sont multiples et variées. Les contrôles se conservent plus facilement, comme les photocopies de documents distribuées par le professeur. Il requiert cependant un apprentissage pour l'organiser correctement car il est peu utilisé au primaire. En contre partie, un classeur apprend à être ordonné. Mais le professeur veillera à contrôler très souvent la tenue des classeurs car les élèves peu soigneux peuvent rapidement être en perdition dans la discipline du fait d'une gestion calamiteuse des feuilles volantes.

     

    Si le choix du type de fourniture reste en général du ressort du professeur, il est important d'en avoir une vision globale et pluridisciplinaire et se rendre compte que la gestion cohérente d'un cahier ou d'un classeur n'a rien d'évident et peut induire des difficultés scolaires difficilement surmontables sans un suivi régulier de l'ensemble des enseignants.

     Cahier ou classeur ?


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  • Le conseil de classe fait partie des rituels propres à l’éducation nationale. Il est attendu car il termine chaque trimestre et semble laisser penser que tout peut recommencer en remettant les compteurs à zéro, mais son échéance est aussi redoutée. Les élèves savent que leurs résultats et leurs comportements seront commentés, les moyennes seront inscrites sur les bulletins et les avis vont tomber comme des couperets, écrits et paraphés noir sur blanc au bas de la page.

    Pour un élève le conseil de classe peut s’apparenter à une dramaturgie. Les meilleurs d’entre eux attendent une récompense, les félicitations, d’autres espèrent les encouragements, mais les plus en difficulté peuvent craindre le regard des membres de cette commission, et pas seulement d’un professeur isolé.

    Un conseil de classe bâclé, rapidement mené, est une caricature improductive d’une réunion institutionnalisée. Un conseil de classe est un lieu d’échanges, qui parle de la classe et qui prend le temps de considérer l’élève comme un individu qu’on prend au sérieux et pour lequel on montre de l’intérêt. Pendant un conseil de classe des décisions importantes peuvent être prises. Il y a aussi les propositions qui concernent l’orientation, c’est-à-dire en partie l’avenir de chaque élève. Parfois on hésite, on tergiverse. Dans ce cas, pourquoi faudrait il avoir peur de donner sa chance à un élève ? N’est ce pas à lui de montrer son talent, même quand personne ne le lui reconnaît ? Pour éviter d’avoir à traiter trop de demandes d’orientations incohérentes, les professeurs opèrent d’abord en amont par la formulation de conseils et la rencontre avec les parents. En parallèle, le professeur principal récapitule, synthétise, met en perspective, accompagne la maturation du choix et fournit à l’élève les critères de décisions. Dès lors, le conseil de classe participe à la construction du projet de l’élève en donnant des clés pour l’aider à se projeter dans le futur.

     

    Le conseil de classe est présidé par le chef d’établissement, ou son représentant, qui le dirige et en est l’animateur. Il est composé des professeurs, des délégués des élèves et des parents, du conseiller principal d’éducation (CPE), du conseiller d’orientation psychologue (COP), et si besoin d’un personnel de santé. Il se réunit trois fois par an.

    La parole est libre et les propos respectueux des uns et des autres. Les représentants des parents et les délégués des élèves n’ont pas à être seulement tolérés dans cette assemblée. Ils siègent du début jusqu’à la fin et participent au même titre, avec les mêmes droits et devoirs de parole que les autres membres de la communauté éducative.

     

    Tout conseil de classe s’anticipe suffisamment longtemps à l’avance et se prépare. Un bilan est organisé par le professeur principal, à l’oral et à l’écrit, pour connaître l’ambiance de la classe, les problèmes rencontrés, qu’ils soient d’ordres pédagogique ou organisationnels. Chaque professeur, même quand il n’a pas la mission d’être le « principal » a tout intérêt à initier pour sa matière une discussion avec les élèves afin de connaître les difficultés qui concernent sa discipline dont il n’aurait pas conscience. Cela évite les rumeurs et montre aux élèves qu’on écoute leurs problèmes. C’est aussi l’occasion de donner à chacun sa moyenne trimestrielle (sur papier libre, et non à l’oral) et de provoquer un débat sur les évolutions constatées dans la classe, les attendus et les points jugés importants.

     

     

     

    DEBUTER :  Le conseil de classe

     

    dessin de Fabrice Erre, publié dans Le Monde, 25 Novembre 2014

     

    Les bulletins scolaires

    Quelques jours ou quelques semaines avant le conseil, les professeurs remplissent les bulletins scolaires. Leur consultation montre que les avis des professeurs sont principalement axés sur des commentaires de résultats scolaires. La place pour écrire est certes très limitée. Or, le contenu d’un bulletin est un texte écrit et non oral. Par conséquent, son impact peut être lourd de conséquences pour l’adolescent et sa famille qui liront et s’imprégneront des informations inscrites. Il peut d’abord se révéler anxiogène si les mots employés et les idées développées sont soumis à interprétation. Il peut aussi avoir l’effet inverse de celui qui est recherché. En effet, un bulletin qui ne contient que des propos négatifs ou péremptoires ne laisse à l’élève aucun espoir de pouvoir s’améliorer, en terme de comportement ou de résultats. Il s’en suivra généralement la poursuite de la détérioration de son travail et de son attitude en classe.

    On gagne par contre en efficacité à pouvoir développer des idées en évitant les termes imprécis comme « manque de méthode », « travail superficiel », « passable »… En effet, dire à des parents que leur fils ou leur fille manque de méthode ne donne pas les clés pour résoudre cette difficulté. D’autant que les compétences d’ordre méthodologiques dans les différentes matières enseignées ont des points communs mais aussi présentent des aspects singuliers et propres à chacune. De même que signifie le terme « superficiel » ? Que les leçons ne sont pas assez apprises ? Que la réflexion est insuffisante ? Que les exercices sont bâclés ? Et que signifie « passable » ? Si une moyenne de 10-12 est effectivement passable, cela correspond à la grande majorité des élèves, ce qui ne relève pas d’un enthousiasme débridé.

    On comprend donc qu’il faille éviter le simple constat basé sur les résultats qui serait redondant avec la moyenne. Le bulletin est l’occasion d’indiquer aux parents ce que sait faire l’élève et quelles sont les pistes de progrès, quel type d’efforts seront gagnants. En évitant les propos stéréotypés et les formes verbales relevant des automatismes de langage, on peut proposer des appréciations personnalisées, claires, précises, plus efficaces. Par exemple, au lieu d’écrire « qualités et capacités inexploitées », pourquoi ne pas expliquer comment se mobiliser en donnant des conseils explicites.

    Enfin, il faut savoir qu’un élève ne décrypte pas forcément dans les commentaires ce qui est de l’ordre du positif ou ce qui relève de propos négatifs, en particulier quand les expressions sont sujettes à interprétation. Il est important, après la remise des bulletins, d’en faire une lecture personnalisée pendant l’heure de vie de classe. C’est le professeur principal qui s’en charge. Par exemple, il est instructif de demander aux élèves de souligner d’une couleur ce qui relève du positif, d’une autre ce qui est factuel, et d’une troisième couleur ce qui correspond à une demande d’amélioration. Cela permet ainsi au professeur principal de préciser ce qui est écrit pour que l’élève comprenne les demandes exprimées par les enseignants[1].

     

    Pendant le conseil de classe

    Au début, le professeur principal ou un représentant de l'équipe pédagogique expose au conseil de classe les résultats obtenus par les élèves et présente les conseils en orientation formulés par l'équipe. Les délégués des élèves et les délégués des parents ont la possibilité de s’exprimer à cet instant pour exprimer le sentiment général des personnes qu’ils représentent et pour poser quelques questions si ils le souhaitent. Les propos doivent rester respectueux des élèves et des professeurs. Quand on passe à l’examen des cas individuels, les professeurs argumentent chacune de leurs remarques par des exemples toujours factuels, sans porter un quelconque jugement de valeur. Le conseil de classe n'est pas un lieu de règlement de comptes (il n'est pas non plus un tribunal en direction d'un enseignant). On arrête ensuite une position commune en tenant compte non seulement du déroulement de la scolarité mais aussi en prenant en considération des éléments d’ordre éducatif, médical ou social.

     

    Les jeunes professeurs se demandent parfois quelle attitude il faut avoir dans un conseil de classes. Comme dans toute réunion, il n'est pas opportun d'être passif, cela signifierait qu'on ne s'intéresse pas aux élèves, à leurs problèmes, mais il serait tout aussi vain d'adopter un comportement hyperactif qui agacerait  rapidement ses collègues et le président de séance.

    Il s'agit d'écouter les avis de ses pairs, de comprendre les divergences, d'apprendre comment se comporte l'élève dans une autre discipline, d’entendre les remarques des parents ou des élèves, d'échanger. En adoptant un ton courtois, en étant ouvert aux autres, on participe évidemment à rendre l'atmosphère agréable et à éviter de créer du stress qui au final contribuerait à durcir sans raison objective les commentaires portés au bas des bulletins. Le doute bénéficiant toujours à l'élève, une certaine bienveillance s'impose. Le respect vis à vis des collègues s'observe dans la façon d'écouter et de tenir compte des remarques de chacun, quelle que soit la discipline, sans créer une hiérarchie stérile entre les matières enseignées.

    Si le jugement porte effectivement sur des faits comme les résultats ou l'attitude en classe et dans l'établissement, on n’oubliera pas de s'intéresser à leur évolution. Si elle est positive, il faut l'indiquer en utilisant un vocabulaire positif, si par contre l'équipe éducative constate des baisses dans les moyennes et des errements en terme de comportement, il est tout autant essentiel de le porter à la connaissance des parents et d'en rechercher les causes.

     

    Après le conseil

    Dans certains cas, lorsque les lacunes sont préjudiciables à la poursuite des études, qu'elles soient de types méthodologiques ou qu'elles portent sur les connaissances, le fossé en terme d'attendus devient si important qu'il est illusoire d'imaginer qu'un surcroît de travail personnel, en autonomie, permettra de remettre de l'ordre à une situation que tous voient dégénérer. Une analyse fine de la situation permettra à l'équipe pédagogique de proposer la mise en place d'un plan personnalisé de réussite, en collège (PPRE) ou en lycée. Dans tous les cas une contractualisation entre lui, les parents et l'école est bénéfique. Le plan définit quelques objectifs à atteindre, pas trop éloignés du niveau de l'élève, et indique clairement quelles compétences sont à travailler pour y parvenir. La remédiation, plus ou moins individualisée, est l’occasion de travailler avec lui autrement, pendant le temps où il est dans l'établissement. Basé sur les compétences, en lien avec les disciplines, les exercices doivent porter sur des capacités précises et pas sur des connaissances. L’apprentissage des leçons, fait à la maison, sera vérifié périodiquement sous la forme d’évaluations formatives. Les méthodes adoptées par les enseignants qui interviennent dans la remédiation se démarquent de celles qui sont mises en oeuvre en classe pour apporter un regard nouveau et différent sur la difficulté rencontrée pour essayer de la résoudre. Ce suivi pédagogique est organisé en lien avec le professeur principal qui assure la coordination globale. Il dure généralement quelques semaines. Un bilan est réalisé à l'issue.

    Cette organisation demande un gros investissement de la part des professeurs qui ne peut se réaliser qu’avec la mise en œuvre d’une stratégie d’ensemble, réfléchie en conseil pédagogique et co-organisée avec l’équipe de direction et les CPE. Quand le fonctionnement est optimisé on entre alors dans une démarche qualité qui est tout à fait profitable aux élèves, et à terme à toute la communauté éducative qui constate des améliorations dans les classes et dans la cour de l’établissement en terme à la fois éducatifs et pédagogiques.



    [1] Certains professeurs principaux profitent d’une heure de vie de classe ou d’accompagnement personnalisé pour demander aux élèves d’écrire leur propre bulletin en amont du conseil de classe. La comparaison avec le bulletin réel quelques jours après, toujours en heure de vie de classe, se révèle d’un grand intérêt. Elle permet à l’élève de mieux lire et comprendre son bulletin et au professeur de l’y aider en montrant où se situent les incohérences de perception et d’avoir un échange individualisé avec lui sur les divergences constatées.


  • La maîtrise du temps est un facteur clé quand on est enseignant car les apprentissages s’inscrivent dans une logique de programme. Pour y parvenir il définit des objectifs à atteindre et des compétences à acquérir. La liberté pédagogique est laissée à l’enseignant pour répondre à la demande inscrite dans le référentiel, sous réserve d’être en cohérence avec des méthodes d'apprentissages effectifs. Il ne sert en effet à rien de « boucler un programme » si les élèves ne comprennent pas les attentes et ne progressent pas, ou pas suffisamment.

     

    Un objectif, un calendrier, une méthode

     

    Les enseignants débutants et les professeurs contractuels font parfois l'erreur de considérer que le manuel scolaire définit le programme. Or, celui ci n'en est qu'une interprétation, et des erreurs y sont présentes, ceci quelle que soit la qualité des auteurs. Un programme est toujours publié au bulletin officiel. Il est précédé d'un préambule qui en définit l'esprit et indique les orientations que la commission a voulu lui donner.

    Les programmes actuels sont désormais écrits en terme de connaissances et de compétences à acquérir. Par conséquent, respecter le programme consiste d'abord à en comprendre le sens pour le décliner en savoirs et en modes opérationnels. Pour cela une progression annuelle est élaborée dès la rentrée et le professeur s'y tient autant que faire se peut. Cette programmation est constituée de séquences qui correspondent aux grandes thématiques étudiées durant l'année scolaire. Chacune d'entre elles s’étale sur une durée de six ou sept semaines en général.

    Les séances de cours s'inscrivent dans une séquence et ne sont pas indépendantes les unes des autres puisqu'elles possèdent un fil conducteur, le thème de la séquence.

     

    Construire une séance

    Pour réussir une séance de cours, il faut savoir la commencer et correctement la terminer. Un cours ne débute que lorsque les élèves sont réceptifs, quand ils sont assis et à l'écoute. Quand on sait qu'un élève peut voir dans la journée six ou sept professeurs différents, et changer autant de fois de disciplines, on comprend que la phase d'introduction pendant laquelle le problème du professeur doit devenir le problème de l'élève n’est pas une mince affaire. Mais cela ne suffit pas. En effet, une fois le problème posé, définir l'objectif à atteindre et la façon d'y parvenir sont des points clés pour que le succès soit au rendez vous.

     

    Ainsi, très rapidement, les élèves doivent avoir un travail à réaliser et savoir pourquoi ils l’exécutent. Pour y parvenir, les consignes et les objectifs sont clairs, précis et compris de tous. Voir ou écouter ne suffisent pas pour apprendre. c’est quand on fait soi même qu’on est le plus performant, quand les élèves sont mis en activité de recherche, d'observation, d'analyse, de lecture, de calcul. Comme on l’a vu dans les chapitres précédents, l’acquisition progressive des compétences de la maîtrise de la langue conduit ensuite à faire produire une trace écrite par les élèves. D’autant que c'est elle qui structure l'esprit et permet au professeur de mieux comprendre les difficultés ou les erreurs de chacun. Rappelons aussi qu'une activité est efficace et efficiente, si elle fait sens pour l’élève[1].

    La trace écrite au sens large (qui peut être la production d’un texte, d’un graphique, d’un schéma) est aussi le moyen pour les élèves d'échanger des idées sur un mode non oral et plus complexe. Il y a donc un avantage pour le professeur d'utiliser les productions des élèves pour dérouler la séance, tout en poursuivant un but précis dans un temps donné. Cette formation qui s'appuie sur une mise en commun des travaux, suivie d'une réflexion collective est bien plus riche qu'une prise de notes sous la dictée du professeur.

    Quel que soit le mode opératoire arrêté, puisque les élèves débutent le cours par un questionnement, ils est logique qu'ils puissent quitter la salle en ayant obtenu une réponse en sortant. Dans les cahiers les productions des élèves qui contiennent des erreurs ou des imprécisions sont laissées, elles montrent comment la pensée intellectuelle se construit. Mais il ne faut pas qu’elles soient confondues avec le cours à apprendre. La structuration est le fait du maître et tous les élèves conservent sur leur cahier une trace identique des conclusions de la séance.

     

    Une autre erreur récurrente des jeunes professeurs consiste à vouloir en faire trop : trop parler, trop d'objectifs imprécis, trop de connaissances à acquérir, trop d’exercices à corriger...

    La question ne serait elle pas finalement de savoir « comment le professeur peut être présent physiquement dans la salle tout en se faisant oublié la plupart du temps pour laisser les élèves agir et interagir? ».

    Débuter est le lot commun de tous. Les premiers pas sont d’habitude synonymes de tâtonnements, d’essais, de succès et d’erreurs. L’important n’est pas de tout réussir mais de savoir analyser chaque séance pour en déduire des invariants utiles à la gestion de classe ou des méthodes pédagogiques propices aux apprentissages. Une séance étant constituée de plusieurs activités indépendantes et complémentaires, les moments pendant lesquels les élèves ont eu un comportement conforme aux attendus alternent souvent avec des phases moins positives. Ainsi, en variant les activités, non seulement on ne peut se tromper tout le temps mais on maintient aussi une tension dynamique à l’intérieur du groupe qui aura un effet d’entraînement collectif et qui maintiendra l’attention et l’intérêt des élèves.



     

    DEBUTER : Construire une séance, une progression

    [1] Une activité est efficace si elle accroît les acquis. Elle est efficiente si l'énergie dépensée pour parvenir au résultat est compatible avec l'intérêt qu'il représente.


  •  Dans les yeux des élèves, un jeune enseignant est d’abord un professeur comme les autres. Cette reconnaissance institutionnelle est d’ailleurs ce qui le protège des inévitables maladresses qu’il commettra la première année. La contrainte pour lui est qu’il a le mêmes élèves, les mêmes devoirs et obligations que ses collègues, dès le premier jour de classe. Il faut par conséquent qu’il trouve les ressources pour être performant le plus vite possible, même quand l’entrée dans le métier n’a pas été à la hauteur des espérances. 

     

    Plusieurs fausses « bonnes idées » guettent les jeunes professeurs. Elles sont pourtant généreuses car elles veulent créer du lien en partant du principe que la proximité générationnelle est d’abord un atout. C’est vrai quand la relation s’est établie sur des bases solides et positives. Mais si des difficultés importantes apparaissent, le manque d’expérience peut conduire à des crispations fortes lorsque le jeune professeur n’entend pas les remarques des élèves et les conseils formulés par ses aînés.

     

    Il n’est jamais trop tard pour apprendre

     

    Une première erreur classique est de confondre l’enseignement avec de l’animation. Or, on n’est pas à l’école pour jouer, mais pour apprendre. En d’autres termes, toute activité qui ressemblerait à de l’occupationnel ne permettra pas de structurer la pensée et discréditera très vite le professeur.

     

    En débutant, nombreux sont ceux qui pensent naïvement que pour être un bon enseignant il suffit de créer un lien non hiérarchique, de type amical entre eux et les élèves. Du coup, les activités qu’ils vont proposer seront amusantes, le registre de langue utilisé sera celui des adolescents. Passé la surprise des premières heures de cours, de nombreux jeunes vont se sentir autorisés de ne plus écouter et de ne plus s’intéresser à la leçon. Puisque hors de l’école chacun est libre de pratiquer l’activité qui lui plait, faisons pareil en classe si on est dans l’occupationnel !

    Les enseignants ne sont pas des parents, bien qu’ils aient un rôle éducatif évident, ils ne sont pas non plus des grands frères ou des grandes soeurs avec lesquels on partage des confidences, ils ne sont pas enfin des camarades avec lesquels on s’amuse. Avoir un comportement courtois, avenant et une attitude positive, ne signifie pas qu’il faille sympathiser. Les difficultés d’apprentissage et les problèmes de type personnels se traitent en professionnel. Il s’agit donc d’être à l’écoute, en empathie pour comprendre, montrer de la sensibilité pour entendre les problèmes personnels. Les élèves n’ont pas besoin d’un copain supplémentaire qui leur prodiguera des conseils équivalents. L’approche doit être tout autre et en adéquation avec une posture de professeur. Quand les élèves s’adressent à lui c’est avant tout à un adulte référent qu’ils parlent. Très vite, si le modèle est celui du copain, les élèves vont demander des services ou des privilèges qu’ils n’obtiendront pas et leur réaction sera du coup très négative car de type affectif.

     

    Un enseignant qui a l’estime de ses élèves est celui qui a de l’ambition pour eux. Cela ne consiste pas à élever le niveau démesurément avec comme résultat d’intéresser quelques élèves brillants qui réussiront, aider un nombre plus ou moins grand d’élèves supplémentaires qui essaieront de surnager avec l’aide des parents ou en prenant des cours particuliers et délaisser un groupe qui abandonnera vite toute velléité d’atteindre les objectifs fixés. Pour créer l’appétence qui donnera envie à chacun de participer, d’essayer et de proposer des solutions, les élèves doivent être convaincus que leur enseignant a le sentiment qu’ils pourront progresser.

    Cela, ils le voient dans le regard porté sur eux, dans la manière de s’adresser à eux, dans le temps qu’ils consacrent à les soutenir dans le labeur.

    Avoir de l’ambition, c’est être exigeant sur la qualité des productions et leur montrer qu’ils peuvent y arriver sans faire à leur place[1]. Le niveau étant défini par le programme, il suffit de le respecter sans l’interpréter au-delà du raisonnable. Pour faire un bon film, un bon scénario a besoin d’un bon metteur en scène pour diriger les acteurs et sublimer leur jeu.

     

    La question du tutoiement ou du vouvoiement de l’élève est récurrente et fait suite aux remarques précédentes. Le tutoiement n’est pas irrespectueux vis-à-vis de l’élève, il permet simplement une proximité qui est adéquate si l’enseignant sait parfaitement tenir son rôle. Le vouvoiement installe au contraire cette distance qui peut faire défaut à certains, en début de carrière. Il concerne les classes de terminales comme celles de sixième. Bien entendu, il n’y a pas de réciproque possible, les professeurs, au collège comme au lycée, sont vouvoyés.



     

      DEBUTER : Jeune professeur face à des élèves

    [1] On pourrait reprendre l’expression de Maria Montessori a propos de l’attitude du maître face à l’éducation des jeunes enfants : « aide moi à faire seul »


  •  

    Pas facile d'aider un jeune professeur. Voici peut-être sept conseils pour les professeurs débutants :

    1. Etre souriant et accueillant
    2. Agir en professionnel
    3. Faire cours pour ses élèves, non pour soi ; communiquer avec eux
    4. Respecter les élèves ; exiger la réciproque
    5. Etre organisé
    6. Commettre des erreurs pour progresser
    7. Evaluer positivement

     

    La première heure, le premier jour de classe

    Le premier jour de classe est arrivé. L’angoisse est présente et en même temps une formidable envie de commencer. Pour éviter toute source supplémentaire de stress, il vaut mieux arriver tôt dans l’établissement.

    En collège, les élèves attendent dans la cour l’arrivée du professeur ; en lycée ils entrent dans les bâtiments et se dirigent seuls vers leur salle de classe. Déjà, dans les couloirs, on commence à s’observer, à se jauger. On reste souriant.

     

    La clé glisse dans la serrure, la porte s’ouvre. Les élèves, rangés dans le couloir, entrent en passant devant le professeur. C’est l’occasion de les saluer.

    Puis, ils choisissent leur place. Ils restent debout et attendent un signal du professeur pour s’asseoir, quand l’agitation a décru. Dans les bâtiments on enlève bonnet et casquette, en classe on enlève son blouson et son écharpe. C’est la règle, elle ne souffre pas de discussion.

     

    A cet instant les élèves attendent que le professeur prenne la parole, qu’il se présente et dise quelques mots de bienvenue. Si le silence n’est pas tout à fait présent, il n’est pas inutile de faire une remarque, sans agressivité, pour montrer l’importance qu’on attache à une installation sereine pour se mettre rapidement au travail.

    On explique les objectifs du programme, sans mettre une pression inutile sur les épaules des élèves dès la première heure.

    Si un élève bavarde trop, on peut lui demander si il n’a pas compris ce qui vient d’être dit ou si il veut ajouter quelque chose. Ne pas entrer dans le jeu des élèves provocateurs, rester neutre et professionnel, courtois et ferme dans le ton.

    Quelle que soit la manière de s’y prendre le premier jour, il ne faut pas improviser de trop. Suivre un scénario qu’on a écrit et imaginé est le meilleur moyen de s’assurer que tout se passera bien. Si on y perd en spontanéité, on gagne en sécurité, en particulier quand on débute.

    Pendant tout ce temps, on reste forcément concentré, toujours calme, même si intérieurement l’inquiétude est forte.

     

    Puis vient le moment de la fiche de renseignements demandée aux élèves. Il est inutile de multiplier les questions, les seules qui sont pertinentes sont celles qui seront utiles au professeur. Certains enseignants se limitent à des demandes factuelles, administratives, d’autres ajoutent des questions de nature pédagogique. L’intérêt est de pouvoir en profiter pour initier une discussion sur la discipline, sur le programme de l’année, de se découvrir les uns et les autres et montrer l’importance accordée à une écoute réciproque, tolérante et respectueuse.

     

    Quand la journée se termine, fourbu, le jeune professeur comprend que ce métier n’est pas de tout repos, qu’il est exigeant mais que sa richesse tient d’abord dans la relation humaine, celle qui se construit, jour après jour, entre des adolescents aux facettes et aux comportements divers et des adultes qui donnent un sens à cet environnement économique, culturel, politique qui fait le ciment de la société.

    DEBUTER : La première heure, le premier jour de classe





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