•           Evaluer sans note, c'est possible?

    Aujourd’hui, des professeurs de collège se sont lancés dans l’évaluation sans note des élèves[1]. La pratique se diffuse dans tous les types d’établissements, même si elle n’a pas encore atteint un point critique qui interrogerait de manière forte les autres enseignants.

    L’évaluation sans note ne peut pas être mise en œuvre sans au préalable avoir réfléchi à la stratégie à adopter vis-à-vis des parents.

    Il y a d’abord une demande d’être rassuré, ce qui peut être fait en expliquant que les élèves progresseront aussi en adoptant une autre stratégie d’évaluation. Cela se concrétise par des rencontres régulières avec les parents pour répondre à leurs questions et diminuer leurs angoisses. Tout le monde n’étant pas un professionnel de la pédagogie, les professeurs devront simplifier la présentation et la formulation des compétences et ne proposer qu’une liste limitée des principales capacités qu’ils évaluent. On cherchera alors à impliquer les parents pour la réussite du dispositif. Si la plupart d’entre eux restent neutres et plutôt indifférents, certains sont franchement hostiles. La principale raison est l’inquiétude de ne pas savoir situer son enfant par rapport aux autres quand la question devrait plutôt être de savoir quel est le niveau de ses acquis en regard de ce qui est attendu. La même forme d’inquiétude ou de rejet peut se retrouver chez certains élèves, en général les plus scolaires et ceux qui réussissent bien à l’école traditionnellement.

     

    Si les professeurs admettent volontiers que l’absence de note aura comme conséquence positive de créer un climat plus serein dans la classe et moins de stress chez la plupart des élèves, ils s’inquiètent aussi de savoir si ces derniers sont capables de travailler et de s’autodiscipliner sans l’épée de Damoclès que constitue la note ? Cette conception suppose qu’un jeune ne connaîtrait que le bâton et la carotte pour s’investir un minimum dans un travail scolaire prétendument difficile ou rébarbatif.

    Les élèves ne sont pas dupes, ils savent pourquoi ils travaillent à l’école. Pour réussir, poursuivre des études dans le domaine qui leur plait et répondre aux attentes de leurs parents. Sans oublier le plaisir qu’ils éprouvent dans les disciplines pour lesquelles ils ont une attirance naturelle.

    Malgré tout, il n’en reste pas moins vrai que dans un premier temps certains d’entre eux se désengagent du travail, soit parce qu’ils sont privés d’une rétribution gratifiante (la bonne note), soit parce qu’ils ne voient plus de sanction immédiate (la mauvaise note). Le réinvestissement scolaire est à reconstruire, et le rôle des parents est fondamental pour limiter ce temps de flottement. Plus vite les parents seront convaincus, ou du moins accepteront la pratique de la classe sans note, plus rapidement les enfants entreront dans ce schéma de pensée pour en comprendre tout l’intérêt.

    Pourquoi alors ne pas faire confiance dans cette intelligence des élèves et l’apprentissage d’une autonomie plus marquée pour s’en servir comme levier pédagogique ?

     

    Les classes sans note ne peuvent fonctionner correctement que si toute l’équipe pédagogique est impliquée dans une pratique collective réfléchie et aboutie. Au moins deux raisons le justifient. Le regard porté sur chaque élève a besoin d’être affiné et discuté ensemble pour apporter la remédiation la plus efficace et la plus personnalisée possible. La formulation des items, leurs choix, les disciplines qui les évaluent à moment donné sont aussi de véritables sujets de discussions et de débats.

    Ce principe de travail partagé se retrouve aussi dans le fonctionnement de la classe. La collaboration entre élèves est recherchée, via l’autoévaluation ou l’évaluation par les pairs. On peut noter que ce type de démarche pédagogique n’est pas lié à la présence ou à l’absence de notes. Il semble cependant difficile de réussir une expérience de classe sans note sans accroître une coopération entre élèves habituellement limitée.

     

    Si la note disparaît au profit d’une évaluation qualitative, moins « mathématique », mais peut être plus précise, il faut être vigilant et ne pas risquer de trop ou de ne pas assez évaluer les élèves. A trop vouloir évaluer on en oublie l’essentiel : les apprentissages, le plaisir d’apprendre, le temps de maturation et de compréhension. Quand la fréquence d’évaluation diminue trop, de la même manière quand il n’y a pas assez de devoirs et d’interrogations, la connaissance des élèves et de ses performances reste trop imprécise et les remédiations insuffisantes pour tenir le rythme des programmes en étant certain que les élèves progressent.

    Ainsi, la difficulté qui se fait jour pour le professeur, mais qui peut être parfaitement résolue, réside dans la maîtrise du rythme d’évaluation, du contenu, de la définition des compétence, de l’élaboration des supports et de la variété des formats.

     

    Au niveau international, nous pouvons constater que les pratiques d’évaluation sont diverses. Certains pays, à l’instar de la France, notent les élèves à partir de l’école élémentaire[2], d’autres n’utilisent les notes qu’à l’entrée au collège (ou équivalent). Certains, plus rarement, poursuivent l’évaluation non chiffrée jusqu’à l’âge de 14 ans. Cela montre que l’intérêt de l’évaluation par compétence peut difficilement se passer des notes à partir d’un certain niveau d’études.

    La notation va prendre sens, à partir du niveau quatrième, quand il s’agira de construire des parcours d’orientation et de répondre à des examens certificatifs (le brevet des collèges, puis le baccalauréat). A côté de l’évaluation des compétences qui demeure un acte pédagogique central, l’apparition des notes et des moyennes permettra une approche nouvelle, un regard plus concis, et fatalement la comparaison des élèves entre eux sera accrue. Un classement dans la classe permettra d’indiquer où se situe l’élève par rapport à ses condisciples. Les choix d’orientation dépendront alors à la fois des qualités repérées par l’enseignant (compétences disciplinaires, et interdisciplinaires) et du niveau disciplinaire atteint, en général défini par la moyenne annuelle.

     

    Evaluer sans note, c'est possible?

     



    [1] Parce que l’expérience est plus rare en lycée, on pourra consulter le document d’une professeure de français qui relate une expérimentation personnelle de classe sans note en seconde et première, et l’analyse qu’elle en fait. Il est disponible en téléchargement sur http://guerrieri.weebly.com/blog/deux-annees-sans-notes

    [2] En France l’évaluation chiffrée n’existe pratiquement plus avant le CM1, voire le CM2.


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  • PISA 2015 va voir apparaitre la résolution collaborative de problèmes.


  • Quels usages pédagogiques de la vidéoprojection interactive? Nouvel article dans la rubrique consacrée au numérique.


  •                                                                                     La vidéoprojection interactive

     

    Depuis dix ans environ sont apparus dans les salles de classe des tableaux blancs interactifs (TBI), encore appelés tableaux numériques interactifs (TNI). Ces outils, à l’époque coûteux, se sont démocratisés et simplifiés dans leur fonctionnement et leur mise en place. Les vidéoprojecteurs interactifs actuels, à courte focale (VPI), n’obligent plus à remplacer le tableau d’origine par un écran spécifique, incompatible avec l’utilisation d’un marqueur. Il s’en suit un essor particulièrement important et rapide de déploiement de cet outil qui présente de véritables plus values pédagogiques, avec la baisse importante des prix et la volonté marquée des différents acteurs de l’éducation (établissement/rectorat/collectivités territoriales).

     

    Vers la disparition définitive du tableau noir

     

    Pour l’heure, ces dispositifs sont souvent utilisés comme des vidéoprojecteur améliorés, mais des pratiques nouvelles apparaissent qui changent profondément l’acte d’enseignement en impliquant davantage les élèves, au quotidien, dans leur formation.

     

    Prenons un exemple. Le professeur propose un document tel qu’un texte dans lequel il faut repérer des formes syntaxiques particulières, ou une carte de géographie à compléter et colorier, ou encore une photographie d’un circuit électrique à schématiser. Par l’utilisation de calques successifs, les élèves vont pouvoir aller très souvent au tableau pour essayer leur proposition, se tromper, revenir facilement en arrière, corriger, voir les évolutions et déterminer in fine la meilleure façon de répondre aux questions de l’exercice.

    Le deuxième intérêt majeur des outils de vidéoprojection interactive consiste à faire travailler les élèves de façon collaborative en favorisant les échanges verbaux.

    Une question ouverte est posée à partir d’une situation déclenchante. Des groupes sont mis en place et travaillent pour proposer une solution. Certains avancent plus ou moins vite vers le résultat, d’autres s’engagent dans des chemins tordus, d’autres enfin réfléchissent à une solution qui se révèlera fausse, incomplète ou impossible. Ici, l’intérêt du TBI est de pouvoir photographier avec un téléphone portable ou un appareil photo différents travaux pour les projeter. Il ne s’agit pas ensuite de porter un jugement sur les productions, mais de montrer qu’il existe plusieurs façons de répondre à la question et de comparer les avantages et inconvénients de chacune d’elles, d’aider les groupes qui sont arrêtés, ou de comprendre ensemble l’impossibilité de certaines propositions.

    On peut aussi penser à la possibilité d’écrire ensemble la synthèse de la leçon qui vient d’être faite. Un premier élève propose sa version qui sera corrigée et amendé par le reste de la classe jusqu’à aboutir à la version définitive qui sera écrite dans les cahiers ou les classeurs.

     

    De nombreuses expérimentations sont proposées sur internet qui méritent que chacun s’essaie à ces nouvelles technologies. Bien entendu, il faut savoir qu’il y a une phase d’appropriation des différentes fonctionnalités mises à disposition avec les logiciels dédiés à la gestion du tableau.

    D’un point de vue pratique, l’utilisation d’un TBI ou d’un VPI peut être liée à un scénario pédagogique imaginé par l’enseignant. Dans ce cas particulier, cela impose un temps de préparation non négligeable qui doit rendre modeste les premières initiatives. Plus quotidiennement l’usage de la vidéoprojection interactive correspond à une forme collaborative du travail scolaire qui laisse une place centrale aux interventions des élèves.

     

    Les TBI/VPI se sont enrichis dernièrement d’un nouvel outil, une mallette « de boîtiers réponses » ou « boîtiers de vote »[1]. Ces boîtiers sont des télécommandes avec des touches numériques qui permettent de répondre à des questions à choix multiples (QCM). Les boîtiers communiquent avec l’ordinateur par voie hertzienne. Il existe des logiciels qui offrent la possibilité de gérer les réponses des élèves, immédiatement, sous forme statistique qui peuvent être vidéoprojetées. On peut ainsi imaginer de proposer des évaluations diagnostiques ou de provoquer un questionnement sur une problématique nouvelle. Mais l’intérêt principal de ce dispositif réside dans un usage similaire à celui du professeur des écoles qui demande à ses élèves de prendre l’ardoise pour répondre à des questions simples pendant le cours. Cela requiert de leur part davantage d’attention et la participation orale est accrue car elle induit le questionnement et l’analyse des réponses fournies.



    [1] On peut noter la possibilité d’utiliser désormais des smartphones comme boîtiers de vote en utilisant par exemple l’application « socrative » qui est téléchargeable sur internet

    Voir par exemple :

    http://www.ac-aix-marseille.fr/pedagogie/jcms/c_281622/fr/travaux-academiques-mutualises-2012-2013

     


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  • COUP DE COEUR : ROSA CANDIDA

    Un livre poétique écrit par l'auteure islandaise Audur Ava Olafsdottir

    Une philosophie de vie qui plonge le lecteur dans un état d'esprit évanescent. Une très belle écriture et un succès mérité.

     


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