•                                                                                           Des intelligences multiples

     

    Chaque être humain se crée un mode d’apprentissage qui lui est propre. Que l’on soit élève ou adulte, on apprend différemment quand on voit, quand on écoute quand on fait. Pour apprendre, nous avons tous besoin de communiquer, partager et d’utiliser l’ensemble de nos sens. Mais certains sont plus développés, dépendant de notre façon de penser qui est personnelle.

    Certaines personnes vont préférer écouter parce qu’elles sont réceptives aux sons, aux mots, à la musicalité de la phrase. D’autres, seront davantage attentives quand on leur présentera une image, un schéma ou un graphique.

    Il y a a contrario les élèves qui n’appréhenderont correctement une situation que s’ils s’en saisissent « physiquement », si ils touchent l’objet d’étude. Dans ce cas ils auront besoin des activités expérimentales en sciences pour comprendre un phénomène alors que la seule approche théorique ne débouchera que sur une impasse cognitive.

     

    Pour rendre compte de ces attitudes diverses on est conduit à chercher pourquoi les élèves (et les adultes) adoptent des stratégies différentes face à un problème qui leur est posé. Howard GARDNER, professeur à l’Université de Harvard, a proposé le concept d’intelligences multiples pour analyser les raisons qui conduisent un enfant normalement intelligent à être en échec scolaire[1]. Il indique ainsi que chacun possède plusieurs types d’intelligences qui le prédisposent pour développer certaines compétences. Dans ce modèle, on distingue aujourd’hui huit formes principales d’intelligences :

     

    -         L’intelligence corporelle – kinestésique

    Elle correspond à la capacité d’utiliser son corps, de pouvoir s’exprimer par le mouvement, d’être habile avec les outils et les objets

    -         L’intelligence intrapersonelle

    C’est la capacité de valoriser ses qualités personnelles et de limiter l’impact négatif de ses défauts.

    -         L’intelligence interpersonnelle

    Complémentaire de la précédente elle permet à un individu de collaborer et de savoir tirer parti de compétences multiples pour arriver au but déterminé

    -         L’intelligence logique-mathématique

    Elle fournit la capacité à raisonner, calculer, mesurer, faire preuve de logique. C’est une forme d’intelligence qui se plait dans l’abstraction

    -         L’intelligence verbale-linguistique

    Elle correspond à la capacité de manier le langage et de penser avec les mots pour explorer le monde des idées

    -         L’intelligence musicale-rhytmique

    Elle est en lien avec les sons

    -         L’intelligence visuelle – spatiale

    Celui qui possède cette forme d’intelligence apprécie les représentations imagées qui lui sont proposées (y compris les graphes).

    Elle permet aussi un repérage précis dans les trois directions de l’espace, ce qui facilite la compréhension en géométrie, technologie ou géographie.

    -         L’intelligence naturaliste

    Elle correspond à la capacité d’observation des phénomènes naturels, et par extension d’interpréter et de classifier le monde étudié, qu’il soit physique ou biologique

     

    Chaque individu disposerait ainsi de formes multiples d’intelligences et de capacités plus ou moins marquées dans chacun de ces groupes. Bien entendu ces capacités ne sont pas figées et peuvent évoluer avec le temps, en fonction de son parcours, scolaire, intellectuel, professionnel, social…

    L’intérêt de cette approche par les intelligences multiples, pour l’enseignant, est de pouvoir porter un regard critique sur le résultat de son travail, en particulier pour analyser les difficultés que rencontrent certains élèves.

    Il existe en chacun d’entre nous des tendances plus ou moins marquées vers un type d’approche pédagogique. Cela entraîne plusieurs conséquences concrètes. La première concerne directement les élèves. En se connaissant mieux, ils peuvent travailler les points faibles qui ont été repérés, en axant le travail méthodologique sur les aspects qui pourraient se révéler handicapant. Pour y parvenir, parents et professeurs peuvent s’appuyer sur des capacités naturellement plus développées pour améliorer les autres. En effet, l’élève doit éviter de stimuler seulement ses seules compétences dominantes dans le cadre d’une formation globale et multidisciplinaire. Quand aux professeurs, ils doivent se rappeler que les modes d’apprentissage de leurs élèves sont singuliers, et potentiellement différents du leur. D’où l’intérêt de varier les types d’approches dans les cours et de ne pas répéter les explications in extenso en pensant que la seule répétition sur un mode plus lent sera suffisant pour que l’élève comprenne et que l’obstacle cognitif soit levé.

     

    Tous les professeurs ont aussi remarqué que certains adolescents ont du mal à se concentrer sur une longue période et s’agitent rapidement. Plusieurs raisons peuvent être invoquées. Mais souvent le problème disparaît ou s’atténue quand on les met en activité, quand on les fait parler ou intervenir au tableau, quand on leur permet de communiquer avec les autres. On peut alors penser qu’ils ont besoin de bouger pour apprendre et de travailler à plusieurs[2]. La question est alors de savoir comment canaliser et utiliser cette attitude et cette énergie plutôt que de vouloir cantonner l’élève dans un schéma éducatif qui ne lui sera pas du tout adapté, au point de le conduire dans des voies qui ne risquent de déboucher que sur la confrontation avec l’adulte et l’échec scolaire.

    Raisonner en terme d’intelligences multiples contribue à une meilleure prise en charge de l’hétérogénéité de la classe par une personnalisation plus fine des apports. C’est au cours des activités de groupes que vont s’exprimer les potentialités de chacun à travers les chemins empruntés pour parvenir au résultat, pour formuler la synthèse qui répondra à la consigne du professeur.

     

    Cette diversité des approches cognitives est aussi particulièrement stimulante pour les enseignants. En acceptant le débat, en proposant des démarches d’investigation ou des problèmes avec des questions ouvertes, le cours s’enrichira d’informations et le professeur, au lieu de répéter plusieurs fois la même trame d’une leçon préparée méticuleusement se plaira de plus en plus à s’ouvrir aux apports inattendus de ses élèves.



    [1] Son livre « Frames of Minds : the theory of multiple intelligence » a été publié aux Etats unis en 1983

    [2] Cet aspect est souvent mal compris des enseignants qui ont été pour la plupart de bons élèves pendant leur scolarité, sachant se concentrer longtemps et rester calmes et attentifs aux propos du professeur.


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  •                                                                                          Comprendre la psychologie de l'adolescent

     

    L’Education Nationale n’est pas une entreprise, et les règles de l’entreprise ne s’appliquent pas à l’Ecole. En premier lieu parce que les professeurs travaillent avec des êtres en construction. Un adolescent n’est ni un enfant, ni un adulte. Les parents savent la difficulté à comprendre ces garçons et ces filles en quête d’identité.

    Les adolescents sont des êtres en transformation, biologique, physique et intellectuelle. D’où cette sensibilité à fleur de peau qui les caractérise. Les adolescents quittent un monde, l’enfance, pour entrer progressivement dans le monde des adultes. Les repères se brouillent, ce nouvel univers est complexe. Il faut y trouver sa place, cela demande de penser différemment, de tenter des expériences. C’est aux adultes d’accompagner, d’être des repères, et savoir que toutes les chaînes seront un jour brisées, qu’il n’y a pas d’enfant qui ne devienne un jour adulte.

     

    Les capacités cognitives des adolescents sont beaucoup plus développées que leur maîtrise émotionnelle

     

    Les premiers repères de l’enfant sont ses parents, sa famille et ses professeurs. C’est parce qu’ils sont nombreux, divers et très différents les uns des autres que les adolescents n’ont pas besoin de “désacraliser“ leurs professeurs comme leurs parents. L’adolescent trouvera toujours chez l’un ou l’autre un intérêt intellectuel, une manière de voir le monde qui l’interroge et lui indique une voie à suivre. Cela confère aux professeurs de grandes responsabilités, d’avoir un comportement positif.

     

    De nombreux ouvrages traitent de la psychologie de l’adolescence, et il n’est pas question ici de résumer en quelques lignes des notions très complexes[1]. Il est important que chaque professeur s’informe sur ce sujet, pour mettre des mots et conceptualiser ce qu’il voit dans ses classes, pour l’aider à trouver des solutions quand il est face à des comportements qui peuvent le surprendre, ou le déstabiliser.

    Tous les professeurs ont été confrontés à des élèves dont le potentiel est largement supérieur à celui qui s’exprime dans la classe. Cela se traduit souvent dans le bulletin par une expression du type « peut mieux faire » ou « a de grandes capacités qui ne sont pas exploitées ». De nombreuses raisons peuvent être avancées pour expliquer que l’adolescent « ne s’investit pas complètement ». D’abord il n’en voit pas toujours l’intérêt et le rapport coût-bénéfice n’est pas toujours pour lui évident. Pourquoi travailler beaucoup plus quand une moyenne convenable suffit à satisfaire parents et professeurs? Il faut savoir aussi qu’un adolescent est une personne en quête d’une identité, mais que cette quête passe par le groupe et s’exprime en référence aux autres, aux copains. Il ne peut par conséquent pas trop se démarquer de ce groupe, et le professeur doit tenir compte de cette capacité d’auto-censure non pas pour l’encourager mais pour apprendre à la dépasser.

    L’enjeu consiste alors à créer une émulation collective qui sera profitable à chaque élève.

     

    Ce questionnement permanent, cette recherche de repères, cette envie d’avancer qui se heurte au désir du repli intérieur pour se protéger du monde environnant, tout cela fragilise les adolescents, au point que certains acquièrent des comportements nocifs, voire destructeurs pour eux ou pour leur proche.

     

    Pour avancer, progresser dans le savoir et les apprentissages, l’estime de soi est un véritable moteur.

     

    Dès lors que l’élève a pris conscience de son potentiel et sait que les adultes qui l’entourent l’accompagnent et lui font confiance, mais aussi sécurisent son environnement, le terrain est propice à une scolarité réussie.



    [1] On pourra se référer aux ouvrages de Marcel Rufo ou Olivier Houdé, par exemple, sans non plus oublier Jean Piaget


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  • La conférence donnée par E. Davidenkoff et E. Morozov à l'ESEN sur le thème "Quels enjeux pour l'éducation dans une société numérique?" est dans la rubrique "vidéos éduc", accompagnée d'une carte mentale.


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  • L’évaluation n’est pas la notation

     

    Evaluer c’est attribuer une valeur à une production, par comparaison à une référence qui correspond dans le cas présent aux attendus du programme. L’évaluation d’un travail, et non pas d’un élève, pose de nombreuses questions : Pourquoi est ce qu’on évalue ? Comment ? Dans quel but ? A quel moment ? Comment prépare-t-on une évaluation ? Quelles remédiations seront proposées aux élèves en difficultés ?

     

    L’évaluation chiffrée (la notation) peut être vécue par les élèves comme une sanction partiale et illégitime quand ils ont eu le sentiment de travailler et que les résultats attendus ne sont pas au rendez vous. Cette condamnation par la note, surtout quand on a étudié, ne peut pas être vécue autrement que comme une injustice. Il ne suffit pas de dire à l’élève qu’il a mal appris ses leçons, ou qu’il n’a pas bien compris, pour le motiver et l’inciter à ouvrir de nouveau son cahier.

     

    Sans le plaisir de réussir, le travail personnel s’étiole progressivement et finit par disparaître. L’échec est patent, celui de l’élève mais aussi celui de l’enseignement reçu

     

    Il n’est pas rare de constater dans les classes des moyennes disciplinaires très faibles, inférieures à 10/20 parfois. Si tel est le cas, cela signifie que les attentes du professeur sont trop élevées, que les conditions d’un apprentissage réussi ne sont pas réunies ou que le cours dans son ensemble n’a pas été compris. Et pourtant c’est en général le travail de l’élève qui est jugé négativement.

     

    Le processus d’évaluation conduit, si on n’y prend pas garde, à chercher une valeur relative qui compare et classe les élèves entre eux. Instinctivement le professeur proposera plusieurs devoirs et interrogations en cours de trimestre pour obtenir des moyennes de classe qui seront souvent similaires d’une classe à l’autre. Certains estimeront qu’une bonne moyenne se situe à 12, d’autres à 14, d’autres à 8. La répartition des moyennes individuelles se faisant autour du pivot « choisi ». Ainsi, il n’est pas rare qu’une moyenne de classe se situe à 11 ou 12. Cela a pour conséquence de créer trois groupes d’élèves répartis à peu près uniformément. Le premier tiers est constitué de ceux qui réussissent et dont la moyenne approchera les 14-15, un groupe central dont les résultats seront moyens ou passables, et un troisième tiers d’élèves en difficultés[1]. Cette « mise en boîte » apparaît couramment, quels que soient la classe et le niveau intrinsèque des élèves. André Antibi a théorisé cet effet en dénommant constante macabre le pourcentage de mauvaises notes, récurrent d’une classe à l’autre[2]. Pour expliquer ce constat, de nombreux chercheurs expliquent qu’un évaluateur va inconsciemment adapter les tests qu’il donne aux apprenants de manière à configurer les résultats sur une moyenne attendue. Si la classe est formée de brillants éléments, les devoirs proposés seront plus difficiles, mais si la classe est composée d’élèves fragiles et en difficulté les exercices seront plus faciles. Au final ces deux classes auront à un ou deux points près la même moyenne et le résultat sera bien celui d’un classement relatif des élèves. La raison n’est pas liée à la malveillance, les enseignants sont dans l’ensemble plutôt bienveillants avec leurs élèves. Mais quand il s’agit de noter, la pression des collègues et des parents provoque une attitude de frilosité pour mettre en oeuvre une notation positive sans qu’il y ait une prise de conscience des effets négatifs que cela entraîne sur le comportement scolaire des élèves. Ce réflexe d’avoir dans les bulletins des moyennes de classes qui avoisinent 10-12 est renforcé par la crainte de perdre en crédibilité vis-à-vis de la société (et de certains élèves) quand les notes sont trop hautes.

     

    Evaluation diagnostique, formative, sommative 

    Puisque « Evaluer » n’est pas réductible au concept de « noter », comment caractériser les différentes formes d’évaluation des élèves ?

    Rappelons d’abord que l’acte d’évaluation n’est pas à distinguer des apprentissages mais y est intégré afin de fournir des informations neutres à l’élève et au professeur dans un objectif double de régulation et de progrès.

    Un processus d’évaluation dynamique tient compte de l’état des acquis à un instant donné de la scolarité mais indique aussi quel pallier d’amélioration a été franchi. C’est la raison pour laquelle l’évaluation sommative à la fin d’un chapitre n’est pas appropriée car cette information sur la progression dans les savoirs et les savoirs faire ne pourra être prise en compte correctement par l’évaluateur.

     

    Une évaluation dynamique prouve à l’élève qu’il retire un bénéfice de l’enseignement reçu car il lui montre que le chemin parcouru, même si il est difficile et tortueux, aboutit à un résultat positif

     

    Il apparaît ainsi trois moments clés au cours des apprentissages pendant lesquels les types d’évaluation seront différents :

     

    L’évaluation diagnostique est proposée au début de la séquence d’enseignement. Elle sert à identifier les obstacles cognitifs (le niveau de connaissances), épistémologiques (les représentations) et méthodologiques. Elle indique à l’enseignant comment aborder une notion avec chaque classe, de manière différenciée.

     

    L’évaluation formative se pratique en cours de formation. Généralement non notée, puisque les apprentissages ne sont pas encore maîtrisés, elle concerne principalement les méthodes. Ce type d’évaluation consiste à apporter une aide ciblée quand la capacité n’est pas encore acquise. Elle peut être pratiquée efficacement en accompagnement personnalisé. Au cours de cette phase, les élèves ont besoin d’être rassurés et leurs efforts valorisés pour les mettre en confiance.

     

    L’évaluation sommative s’effectue en fin de séquence. Elle est généralement chiffrée. Elle sert à réaliser un bilan, pour savoir si les connaissances et les capacités travaillées sont suffisamment solides pour poursuivre le cours dans un autre thème. A cet instant, il n’est pas inutile de reprendre les résultats de l’évaluation diagnostique pour constater avec les élèves les progrès accomplis.

     

    Notons enfin qu’il existe un quatrième type d’évaluation, appelée « évaluation certificative ». Il s’agit d’attester par un examen officiel comme le baccalauréat ou le CAP le niveau de formation atteint. Les évaluations certificatives sont en général externes, dans le sens où le texte du sujet n’est pas construit par le professeur de la classe, qui n’est pas non plus le correcteur. Cependant il se développe à tous les niveaux d’enseignement des évaluations certificatives (y compris en BTS) qui se nomment « contrôle en cours de formation » et qui sont de la responsabilité de l’enseignant des élèves évalués.

     



    [1] L’adoption de lettres (A, B, C, D, E)  pour noter ne change rien à la pratique. L’expérience montre qu’un quart des élèves est évalué A, la moitié  B ou C et un quart ou un peu moins D ou E.

    [2] La constante macabre et l’évaluation par contrat de confiance – voir : http://mclcm.free.fr/documents/060124_EPCC.pdf


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  • Eddy Redmayne, oscar du meilleur acteur pour son rôle dans "Une merveilleuse histoire du temps" qui relate la vie du célèbre chercheur Stephen Hawking

     


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